mercredi 30 mai 2012

Retour aux fondamentaux (2)

Aujourd'hui, encore un bon vieux classique d'il y a longtemps. Celui-ci est tellement rentré dans la culture populaire qu'on ne sait plus vraiment ce qu'il raconte réellement : c'est ce bon vieux Frankenstein de Mary Shelley, écrit en 1818 suite à une espèce de pari passé avec son époux Percy Shelley, Lord Byron et le docteur John Polidori. Tous les quatre passèrent un été en Suisse et le mauvais temps les contraignit à rester enfermés, à se raconter des histoires de fantômes. Pour finir, ils se mirent au défi d'écrire eux-mêmes une histoire de fantôme, et voilà la contribution de Mary Shelley.

Nous connaissons tous les prémices du roman ; Victor Frankenstein crée un monstre à partir de morceaux de cadavres auxquels il parvient à insuffler la vie. La créature échappe ensuite à tout contrôle et se lance dans une frénésie de destruction.

Voilà où s'arrête le rapport entre l'image populaire du roman et ce qui est réellement écrit dedans. Nous avons tous en tête l'image de Boris Karloff portant le maquillage emblématique du monstre, son front carré, ses cicatrices et ses rivets. Nous le voyons déambuler à pas lourds en grognant. Mais cette imagerie est bien loin de ce que Mary Shelley avait en tête quand elle a créé son monstre. Sa créature est en effet monstrueuse, mais pas comme nous pensons nous en souvenir ; c'est l'absence de vie sur son visage, c'est sa taille disproportionnée, ce sont ses yeux morts et jaunes qui font fuir les humains devant lui. Et le monstre créé par Frankenstein parle, s'exprime et même philosophe à grands coups de "thy" et de "doth", dans un langage extrêmement châtié et en maniant des concepts complexes pour tenter de convaincre son créateur de lui adjoindre une compagne. Quelque part, je peux vous dire que ça surprend.

Quant à Victor Frankenstein lui-même, il se présente paré de toutes les qualités, mais au final il abandonne quand même sa créature et ne décide d'assumer ses actes que contraint et forcé. Je n'ai pas vraiment de sympathie pour le personnage, à vrai dire, et l'énoncé de ses vertus, qu'il soit fait par lui ou par un autre, ne me convainc pas.

A vrai dire, Frankenstein n'est pas toujours un très bon livre. Il y a des longueurs, le style est très ampoulé, et certains passages m'ont fait m'exclamer à voix haute : "non mais elle est SERIEUSE ?", comme par exemple celui où le monstre apprend à parler en écoutant depuis une remise en Allemagne une famille de nobles français déchus apprendre l'anglais à une clandestine turque. Ensuite, il trouve par hasard sur un chemin plusieurs livres qui lui permettent de parfaire son éducation, dont le Paradis Perdu de John Milton. Capillotracté ? Mais non.

En revanche, il y a des passages de pur génie, comme celui où Frankenstein, dans une espèce de rêverie fiévreuse à la limite du cauchemar, met les dernières touches à sa création. Ou encore celui de la nuit de noces de Victor Frankenstein. Et le sujet lui-même, le fond du livre, l'aventure de cet homme qui se prend pour Dieu et pêche complètement par hubris, avant d'abandonner sa création et de subir le juste châtiment de ses actes, tandis que sa créature qui aspire à faire le bien devient au fur et à mesure que les humains la rejettent, effrayés par son apparence, aigrie, malicieuse et finalement mauvaise.

Il faut lire ce livre, ne serait-ce que pour revenir aux sources du mythe, et comprendre comment cette histoire est parvenue à marquer des générations entières...

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